La semaine dernière, nous parlions de l’improvisation…
Cette semaine, je voudrais vous présenter un aspect bien particulier de la vie rurale, que, je dois l’avouer,
j’ignorais presque complètement, le sens de la préparation…
Le printemps est revenu et il est bien installé. En ville on se précipite dans les jardineries pour pouvoir
planter ces fleurs qui vont embellir notre quotidien tout l'été...
Dans la vallée, ici et là apparait un carré de terre fraîchement retournée.
C’est sur une de ces parcelles que j’ai rendez-vous avec Remi. Vous le connaissez, vous l’avez rencontré avec
ses chèvres ici et avec ses fromages là…
Il ne m’a pas attendu pour se mettre au travail. La parcelle est aux pieds du village de Montfroc…
Le matériel utilisé reste simple, comme l’est tout ce qui entoure l’exploitation de Rémi et de Cécile.
Inutile de se sur équipé, car cela représente toujours un risque en terme d’équilibre.
Beaucoup d’attention dans la conduite de la machine. Il faut que les sillons soient droits…
La charrue retourne la terre, sans la maltraiter. On dirait qu’elle la caresse…
Rémi fait une pose pour me présenter son travail. Et c’est là que je découvre que pour lui, il n’y a pas de
place pour l’improvisation…
La parcelle qu’il travaille aujourd’hui est en culture depuis des dizaines, et certainement des centaines
d’année. La terre y est légère, presque sans cailloux. C’est une de ses richesses…
Mais, l’autre richesse de cette parcelle, nous devons nous enfoncer dans la haie qui la borde pour la
découvrir. C’est l’eau…
On est ici en surplomb de la rivière et ainsi on a évité les risques d’inondation et de ravinement qui en
découle. Le Jabron coule un peu plus bas. Mais, la parcelle est bordée sur tous ses côté par des canaux qui amènent l’eau d’une source. Cette eau était d’abord utilisée par le moulin, où on
trouve un bassin de retenue, puis, elle vient irriguer les champs.
Il suffit d’ouvrir ou de refermer une vanne, ici ou là pour assurer la parfaite irrigation des cultures. Pas
de pompes, pas de canalisations forcées. On ne prend rien aux nappes phréatiques. Non, les canaux et les rigoles sont là depuis des siècles, et la fierté de Rémi est de pouvoir les maintenir en
état et de les utiliser. Cela ne lui coûte que beaucoup d’effort…
Rémi m’explique que cette année il va sur cette parcelle semer du trèfle. Ma question le fait sourire quand
je lui demande si je pourrais venir pour le voir récolter…
En effet, ce qu’il sème maintenant, il ne le récoltera que dans un an et même deux. Il prépare.
Il prépare sa terre. Il prépare ses récoltes dans un an ou deux…
Cette année, il récoltera sur la parcelle voisine le sainfoin, qu’il a semé l’année dernière, et qui assurera
la nourriture de son troupeau pendant les longs mois d’hiver…
Prévoir… Préparer… Cela semble des notions primordiales pour une parfaite gestion de son exploitation. On est
loin des politiques de production en "flux tendus"...
Alors, je dois le laisser reprendre son travail. Un nouveau sillon, puis un autre…
Il ne s’arrêtera qu’une fois tout le champ retourné. Il ne lui restera plus qu’à le rouler, l’ensemencer,
l’irriguer régulièrement, et le regarder pousser…
Comme tant d’autre avant lui, il sème aujourd’hui ce dont il aura besoin après demain…
Et demain il récoltera ce qu’il a planté hier. Il est toujours au milieu de son travail, qui n’en finit
pas…